Gilles Lesage – Le salut de l’information n’est pas dans le clip


L’auteur reprend ici la conclusion du dossier sur l’information qu’il a signé dans la revue RND de février 2006 (vol. 104, no 2, pages 1 à 14) sous le titre : Où donc s’en va l’information?

Ce qui prime, désormais, c’est la course contre la montre, le va-vite, la surenchère des manchettes contradictoires, la recherche effrénée des primeurs (les fameux scoops), l’action-réaction continuelle du matin au soir, tel un carrousel étourdissant.

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De façon générale, la presse est suralimentée. Ce n’est pas de disette dont elle souffre, mais de surabondance. Une masse souvent informe, pléthorique, répétitive, cyclique. Avalanche un jour, pénurie aux fêtes de fin d’année et en juillet. Concurrence et mimétisme, consensus et censure des pairs, grégarisme et solos!

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Pour reprendre le mot de l’ex-premier ministre Jean Lesage, la presse, «le ministère de l’Opinion publique», mérite les plus grands égards, même si ses représentants sont loin d’être toujours à la hauteur. L’information est utile, nécessaire. Ainsi que le répétait souvent Claude Ryan, petit à petit, l’eau du ruisseau finit par percer le rocher…

Le salut de l'information, s'il en est un, n'est pas dans le flash, le clip fugace ou l'impro... improvisée, mais dans l'explication et l'analyse, d'une part, et dans le commentaire et la prise de position, d'autre part.
Les faits, d'abord et avant tout.

À chacun son rôle, loin des pitreries et du galimatias des humeuristes.
En somme, retour à l'essentiel, à une presse moins obèse et plus alerte.
Globalement, cela signifie qu'il faut s'en remettre, en dépit des dérives, aux principes de base de notre métier: l'exactitude et la précision des faits, d'une part, et la vérification et la rigueur, de l'autre, sans raccourcis, toujours tentants et commodes.

Et pour faire bonne mesure, une bonne dose d'intégrité et de respect, envers les autres et envers soi-même.

La liberté de la presse et le droit du public à une information complète, rigoureuse et courageuse, sont à ce prix.

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Gilles Lesage a pris sa retraite en 1999 après une carrière de 40 ans comme journaliste, principalement au Devoir, où il a été chroniqueur politique, éditorialiste et correspondant parlementaire. Trois prix importants ont souligné l’excellence de son travail : en 1988, le prix Jules-Fournier du Conseil de la langue française; en 1993, le prix Olivar-Asselin de la Société Saint-Jean Baptiste, et en 1995, le prix René-Lévesque de l’Association des journalistes indépendants du Québec. Il a également siégé au Conseil de presse et a été chargé d’enseignement en journalisme à l’Université Laval et à l’Université de Montréal. Enfin, Gilles Lesage a été fait chevalier de l’Ordre national du Québec en 1999 et chevalier de l’Ordre de la Pléiade en 2000.

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